C’est quoi le Péché ?
Nécessairement vu dans une perspective religieuse chrétienne un péché peut être considéré comme le dernier niveau de classification des actes humains sur un territoire spécifique, pendant une durée déterminée et à la merci d’un législateur presque omniprésent. Ou une offense faite à Dieu et une transgression délibérée ou non de la loi divine, à savoir les commandements considérés comme sacrés en tant qu’ils fondent la communauté humaine dans ses relations avec Dieu et avec les autres, et la rendent pérenne. Il est souvent défini comme une désobéissance, un refus, un obstacle au salut ou encore, lorsque le péché est grave, comme une cause de « mort de l’âme », et plus généralement, de désordre au sein d’un groupe identitaire ou rassemblé autour d’une même orthodoxie.
Dans une frange du christianisme, la minimisation du rôle de la grâce dans la lutte libre et volontaire contre le péché s’est rencontrée dans le pélagianisme, doctrine de Pélage qui fut déclarée hérétique par l’Église1.
Étymologie
Selon le dictionnaire Le Petit Robert (édition 2003), ce terme vient du latin peccatum, qui signifie faute, erreur. Son origine serait inconnue. L’adjectif correspondant est peccamineux et a aussi donné impeccable2. On retrouve cette étymologie dans le mot peccadille, qui désigne une faute légère. Le mot italien qui désigne le péché est peccato. Selon Bénaben3, l’origine de peccare est inconnue.
Dans la Bible Hébraïque, le français péché et le latin peccatum traduisent généralement l’hébreu ḥattath (חַטָּאת), qui voudrait dire à l’origine manque, manquement ; c’est l’image de manquer la cible, qui apparaît en Jg 20,16. Dans la Septante, les juifs hellénisés d’Alexandrie l’ont traduit par hamartia (ἁμαρτία), terme repris ensuite dans le Nouveau Testament, et signifiant égarement, erreur, faute, puis dans une interprétation théologique détournement, éloignement de Dieu4.
Péché, religions et athéisme
Voir également l’article détaillé du péché dans chaque religion :
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Péché dans le catholicisme
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Péché dans le judaïsme
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Péché dans l’islam
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Tsumi (terme correspondant au péché dans le shintoïsme)
Pour les chrétiens : notions de péchés originel et effectif
Le christianisme, en particulier, distingue deux notions :
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le péché originel que tous les hommes héritent d’Adam. Ce péché s’étend sur tous les hommes « à la base » sans qu’ils aient dû faire quoi que ce soit de mal. Dans cette vision, l’homme est originellement pécheur, à partir du moment de sa conception. Cette vision repose notamment sur le psaume 51:7 « Voici, je suis né dans l’iniquité, et ma mère m’a conçu dans le péché. »
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le péché effectif, qui est celui qu’un homme commet en fait réellement. L’apôtre Paul estime que les gens commettent des péchés effectifs parce que la nature originellement pécheresse, corrompue, est a priori en eux (Romains 7:14-23).
Pour le chrétien, pécher peut aussi et surtout vouloir dire : « agir de façon contraire à l’objectif ultime recherché soit : la sainteté ».
Pour les catholiques
Historique
La pensée chrétienne des premiers siècles sur les péchés s’es développée autour de la catéchèse baptismale pour les catéchumènes, la rémission pénitentielle des péchés commis après le baptême, la polémique contre les gnostiques puis les manichéens et la vie monastique. La Didachè et l’Epitre de Barnabé opposent les deux voies, d’une part, celle de la vie et du salut, et de l’autre, celle du péché et de la perdition. Se posa rapidement l’attitude chrétienne à prendre concernant la remise des péchés de ceux qui retombaient après le pardon reçu lors du baptême. Cela conduisit à hiérarchiser l’importance des différentes formes de péchés, en distinguant ceux qui conduisent à la mort spirituelle à cause de leur gravité, de ceux quotidiens qui sont plus légers. Les Pères de l’Eglise, particulièrement ceux d’Orient comme Clément d’Alexandrie (150-215) et Origène (185-253), soulignèrent le rôle de la liberté comme cause volontaire des péchés. Ils combattirent à ce sujet les gnostiques qui distinguaient dans l’humanité, à côte de la classes psychique où la libre volonté intervenait, deux autres classe où elle n’intervenait point, à savoir celle hylique prédestinée à la perdition et celle pneumatique prédestinée au salut. Augustin s’appuyant sur la pensée néoplatonicienne développera la doctrine du péché, en approfondissant la nature du péché qui n’est pas une réalité mauvaise s’opposant au bien, mais une privation procédant du libre arbitre en l’absence du secours de la grâce divine5.
La tradition catéchétique rappelle, en s’appuyant sur l’Ancien Testament, qu’il existe des péchés qui crient vers le ciel : le sang d’Abel (Genèse 4, 10), le péché des Sodomites (Genèse 18, 20 et 19, 13), la clameur du peuple opprimé en Egypte (Exode, 3, 7-10),la plainte de l’étranger, de la veuve et de l’orphelin (Exode 22, 20-22) et l’injustice envers les salariés (Deutéronome 24, 14-15 et Jacques 5, 4)6.
Péché et pardon des péchés
Le Catéchisme de l’Eglise Catholique propose pour le péché la définition suivante : » Il est une faute contre la raison, la vérité et la conscience droite. Il est Selon Jésus, la racine des péchés se trouve dans le coeur des hommes d’où : » procèdent mauvais desseins, meurtres, adultères, débauche, vols, faux témoignages, diffamations. » (Matthieu 15, 19-20)7, manquement à l’amour véritable, envers Dieu, envers le prochain, à cause d’un attachement pervers à certains biens. Il blesse la nature de l’homme et porte atteinte à la solidarité humaine ». Il précise que le péché est une offense à l’égard de Dieu, citant le Miserere : « Contre toi, toi seul j’ai péché » (Psaume 51, 6). Les péchés en se dressant contre Dieu détournent de lui les coeurs. Comme le péché originel, celui actuel des hommes est une révolte contre Dieu, consistant à vouloir devenir « comme des dieux », en connaissant et déterminant par soi même le bien et le mal (Genèse 3,5).Par l’exaltation orgueilleuse de soi, l’homme pécheur est diamétralement contraire à l’obéissance à son Père de Jésus lors de sa passion rédemptrice.
L’accueil par les hommes de la miséricorde divine réclame de leur part l’aveu de leurs péchés. En effet, comme le dit Jean dans sa première épitre (1, 8-9) » Si nous disons que nous n’avons pas péché, nous nous abusons et la vérité n’est pas en nous. Si nous confessons nos péchés, il est assez fidèle et juste pour nous remettre nos péchés8.
Jésus Christ, médecin des âmes et des corps a voulu que son Eglise continue son œuvre de guérison et de salut par le pardon des péchés. Dans l’Eglise catholique, ce sacrement institué par le Christ permet à tous ceux qui ont péché de recevoir le pardon de Dieu par l’entremise d’un prêtre à qui ils confessent leur péché9.
Diversité des péchés
Dans le Nouveau Testament
Selon Jésus, la racine des péchés se trouve dans le cœur des hommes d’où : « procèdent mauvais desseins, meurtres, adultères, débauche, vols, faux témoignages, diffamations. » (Matthieu 15, 19-20)7.
Paul, dans sa première lettre, stigmatise ceux qui sont « remplis de toute injustice, de perversité, de cupidité, de malice, ne respirant qu’envie, meurtre, dispute, fourberie, malignité, diffamateurs, détracteurs, ennemis de Dieu, insulteurs, orgueilleux, fanfarons, ingénieux au mal, rebelles à leurs parents, insensés, déloyaux, sans cœur sans pitié », rappelant que « Dieu les déclare dignes de mort. » (Romains1, 28-32). Dans une autre épitre, Paul opposant les œuvres de la chair à celle de l’Esprit Saint, écrit à propos des premières : « On sait bien tout ce que produit la chair, fornication, impureté, débauche, idolâtrie, magie, haine, discorde, jalousie, emportements, disputes, dissensions, scissions, sentiments d’envie, orgies , ripailles et choses semblables (…) ceux qui commettent ces fautes n’hériteront pas du Royaume de Dieu. » (Galates 5, 19-21)10.
Le confiteor affirme que le chrétien peut pécher « par pensée, par parole, par action, ou par omission ».
Péchés capitaux
L’Eglise distingue à la suite de Jean Cassien et de Grégoire le Grand des péchés qu’elle qualifie de capitaux parce qu’ils sont générateurs d’autres péchés. Ce sont : la paresse, l’orgueil, la gourmandise, la luxure, l’avarice, la colère et l’envie11. Cette classification à laquelle Cassien ajoutait la tristesse. remonte au Testament des XII Patriarches, (second siècle avant JC, Premier siècle après JC) au Pasteur d’Hermas (début du second siècle après JC) et à Origène 12 Les péchés capitaux correspondent aux vices dont découlent tous les péchés. Saint Thomas d’Aquin précise d’ailleurs qu’il est plus exact de parler de « vices capitaux ».
Péchés importants liés aux Dix commandements
Les péchés contre le commandement de ne pas tuer sont l’homicide volontaire , l’avortement direct recherché comme fin et comme moyen, l’euthanasie et le suicide, ainsi que la participation à ces actions13. Lors des guerres sont des péchés graves les enlèvements, les prises d’otages, le terrorisme, la torture, les violences, les destructions massives, l’extermination d’un peuple et d’une minorité ethnique14
Les péchés graves contraires à la chasteté, qui est l’intégration réussie de la sexualité dans la relation de personne à personne sont le viol, l’adultère, la fornication, la pornographie, la prostitution, la masturbation et les actes homosexuels15.
Les offenses à la dignité du mariage sont l’adultère, le divorce, la polygamie, l’union libre, l’acte sexuel avant le mariage et en dehors de lui16.
En lien avec le commandement de ne pas voler, le catéchisme catholique cite les salaires injustes, les fraudes fiscales et commerciales, l’usure, la corruption, les contrefaçons de chèques et de factures, le travail mal fait et le gaspillage17.
Le huitième commandement interdit les faux témoignages, le parjure, le mensonge, la médisance, la diffamation, la flatterie, l’adulation et la complaisance18.
Péchés contre la Création
Dans l’encyclique Laudato si’, le pape François se fait l’écho du Patriarche Bartholomée Ier de Constantinople, qui s’est référé particulièrement à la nécessité de se repentir, parce que « dans la mesure où tous nous causons de petits préjudices écologiques », nous sommes appelés à reconnaître « notre contribution – petite ou grande – à la défiguration et à la destruction de la création ». Il invite à « reconnaître les péchés contre la création » : « Que les hommes dégradent l’intégrité de la terre en provoquant le changement climatique, en dépouillant la terre de ses forêts naturelles ou en détruisant ses zones humides ; que les hommes portent préjudice à leurs semblables par des maladies en contaminant les eaux, le sol, l’air et l’environnement par des substances polluantes, tout cela, ce sont des péchés ; car un crime contre la nature est un crime contre nous-mêmes et un péché contre Dieu »19. Il reprend ce thème dans son message pour la deuxième journée mondiale de prière pour la sauvegarde de la Création, soulignant la nécessité de l’examen de conscience et du repentir, et d’avoir recours au sacrement de pénitence et de réconciliation20.
Péché véniel et péché mortel
C’est une manière de hiérarchiser les péchés. Depuis le Moyen Âge, on distingue le péché véniel, c’est-à-dire de faible importance ou commis sans se rendre compte du mal, et le péché mortel, d’importance grave et commis en connaissance de cause. Ce dernier péché est mortel pour la personne qui le commet dans le sens où il la coupe définitivement de la relation d’avec Dieu, ce qui la conduit en enfer si elle ne s’en repent pas. Cependant si nous pouvons juger qu’un acte est en soi une faute grave, nous devons confier le jugement sur les personnes à la justice et à la miséricorde de Dieu21.
Péché et conscience morale
Paul, parlant des pïens ignorant la Loi des juifs, mais accomplissant ses préceptes, dit d’eux : « Ils manifestent la réalité de cette loi inscrite en leurs coeurs, à preuve le témoignage de leur conscience ainsi que les jugements intérieurs de blâme ou d’éloge qu’ils portent.(Romains 2, 5). Et dans cet esprit, la Constitution Gaudium et Spes (n°16) du concile Vatican II : »Au fond de sa conscience, l’homme découvre la présence d’une loi qu’ii ne s’est pas donnée lui-même, mais à laquelle il est tenu d’obéir. Cette voix. Cette loi qui ne cesse de le presser d’aimer et d’accomplir le bien et d’éviter le mal, résonna au moment opportun dans l’intimité de son coeur.(…) C’est une loi inscrite par Dieu au coeur de l’homme. La conscience est le centre le plus intime et le plus secret de l’homme, le sanctuaire où il est seul avec Dieu e où sa voix se fait entendre22.
Péché et athéisme
Il existe plusieurs visions de l’athéisme, mais toutes se rejoignent pour refuser la notion de péché[réf. nécessaire]. Elles peuvent en revanche se montrer attachées à une morale, ainsi qu’au respect de la loi.
Péché et droit
En droit23, on ne parle pas de péché mais de contravention, de délit ou de crime, qui sont alors des transgressions de la loi humaine. Les lois des différents pays ne recoupant pas forcément toutes les diverses lois divines, ce qui est un péché peut ne pas être un délit et vice versa.
Dans certains pays, la loi civile s’enracine dans la loi religieuse, par exemple :
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la charia, en droit musulman, à partir du moment où un État la reconnaît comme telle dans sa constitution ;
et d’une manière générale, à chaque fois qu’un État inclut dans sa loi organique et dans ses différentes codes civils, une référence à la religion et à un texte considéré comme révélé.
Expressions
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Péché de chair : désigne le péché de luxure.
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Doux péché : désigne un péché qui ne semble pas provoquer de conséquences néfastes immédiates ou futures car il est lié au plaisir et au bien être. Cette expression est une manière de s’excuser, mais surtout de relativiser son acte.
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Péché mignon : expression désignant une cause de péché qu’une personne se permet par faiblesse. Par exemple, « La tarte aux pommes, c’est mon péché mignon » se rapporte au péché de gourmandise que le sujet se permet ou se sent incapable de surmonter dans ce cas précis. Utiliser cette expression est également une manière de s’excuser ou de relativiser.
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Sept péchés capitaux.
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Mea culpa : expression latine signifiant « c’est ma faute », parfois utilisée lorsque quelqu’un reconnaît son erreur. Cette expression est extraite de la version latine du « Je confesse à Dieu » (en latin « Confiteor ») de la religion catholique, texte proclamé en début de messe qui demande le pardon des péchés.